En temps réel

Édito

L’association Son et image et le Lavoir Numérique s’associent pour créer En temps Réel, la première édition du festival qui propose d’explorer et d’interroger les horizons de la création documentaire contemporaine, cinéma, vidéo et sonore. En la matière, aucune affirmation ne saurait valoir pour vérité tant le champ des possibles est ouvert et les perspectives multiples. En dérivant à partir des implications et contours de la notion de réel et la manière dont se manifestent ses représentations, deux préoccupations ont irrigué la programmation : tenir une boussole de vigilance éthique devant les esthétiques déployées paraissant parfois gadget ou dystopiques d’une part, et présenter des objets proposant une dramaturgie documentaire racontant ou traduisant avec acuité le présent d’autre part.
 

L’Histoire est traversée par l’apparition de techniques ou médiums dont les artistes se sont emparé•e•s, induisant des langages. Le champ du documentaire contemporain est bousculé depuis un certain temps déjà par le numérique, internet et de manière de plus en plus aiguë par les réseaux sociaux. Mais la supposée ou avérée innovation à cet endroit ne saurait conditionner seule le renouveau. Celui-ci passe aussi par des expérimentations plastiques, temporelles, la réception des œuvres, la singularité des voix documentées, le travail du temps, la confusion entre ce qui est admis comme fiction et documentaire, ou la mobilisation d’archives au présent concordant avec une « libération de l’écoute ». En temps réel se dessine ainsi comme une tentative de prendre le temps de regarder, d’écouter, de questionner ensemble les apparentes profusions de la création, des médiums et médias, l’accélération du flot et flux, la viralité des images… Plus que réifier des objets « nouveaux » - car les mises en perspectives nous apprennent souvent qu’il s’agit surtout de transformations, d’évolutions, de sauts - il s’agit de proposer des œuvres qui en ces termes nous intriguent, nous déplacent singulièrement à un instant t et font autant grandir nos imaginaires que le réel.
 

Joffrey Speno